Pouvez-vous nous dire quelques mots de votre parcours ? Comment devient-on présidente d’une de pharmaciens ?
Domitille de Bretagne : Je suis originaire du Nord de la France. J’ai rêvé très tôt d’indépendance et d’entrepreneuriat : une fibre familiale transmise par mes parents. Mon père, entrepreneur lui-même, m’a inculqué cette idée que l’on apprend mieux et plus vite en faisant ! Après mes études à Lille, j’ai élargi mes compétences en orthopédie et dans le maintien à domicile.
J’ai acheté ma première officine à la barre du tribunal de commerce. C’était une officine en difficulté avec de lourdes dettes. Le défi était de taille, mais cela m’a permis de comprendre l’importance d’un bon accompagnement pour éviter de mauvais choix stratégiques. Aujourd’hui, je gère une pharmacie à Hazebrouck avec une équipe de 14 personnes. Et j’ai pris cette année la présidence de la coopérative, à la suite de Luc Priouzeau.
Quel regard portez-vous sur l’évolution du métier de pharmacien ? Y a-t-il un avant et un après Covid ?
D. d. B. : Le métier a profondément changé. Auparavant, les pouvoirs publics nous considéraient volontiers comme des « pousseurs de boîtes ». Le Covid a mis en lumière le rôle central que nous avions dans le système de soins.
Aujourd’hui nous intervenons dans la prévention, le dépistage et même la prescription. Un pharmacien peut réaliser des tests diagnostiques pour des pathologies courantes comme la cystite ou l’angine et, si besoin, prescrire le traitement approprié. De quoi décharger les urgences et la médecine de ville, et rendre beaucoup plus efficace le parcours de soins.
Mais cette évolution, qui se traduit par des besoins nouveaux en matière de compétences, de formation et de recrutement, requiert des investissements importants, très difficiles à réaliser quand on est isolé.
Giropharm en a fait l’un de ses axes stratégiques et accompagne justement ses adhérents dans ces nouvelles missions. Cela renforce leur rôle d’acteurs de santé de proximité, et cela instaure un lien de confiance qui permet de fidéliser les patients.
J’affectionne le terme de “coopéracteur” : il traduit mon ambition pour les membres de notre réseau !
C’est peu dire que l’année 2024 a été décisive pour Giropharm. Quels sont vos objectifs pour 2025 et au-delà ?
D. d. B. : En effet, en 2024 Giropharm a ouvert un nouveau chapitre de son histoire avec l’acquisition d’Apothera. De 500 pharmacies, nous sommes passés à 1 800 ! Aujourd’hui, le défi est de mobiliser ces 1 300 officines dans l’aventure coopérative.
Ce rachat nous permet aussi d’accéder à de nouveaux outils, comme une plateforme d’achats centralisée et un organisme de formation, pour mieux accompagner nos adhérents.
Notre offre de marques propres s’est aussi étoffée avec l’arrivée de NEP la Marque. Cela nous permet de proposer une gamme diversifiée, allant de l’hygiène à la parapharmacie en passant par la gamme blanche ainsi que des gammes courtes à forte marge.
Et nous avons une vision claire : nos marques doivent refléter l’expertise et les valeurs des pharmaciens en plus d’apporter de la rentabilité. Elles offrent une alternative compétitive aux produits des grandes marques à forte notoriété, tout en répondant aux standards de qualité que nos patients sont en droit d’attendre. Ces marques propres renforcent l’attractivité des officines et offrent en même temps une performance intéressante pour les pharmaciens. C’est un atout supplémentaire du modèle , centré sur le pharmacien et le patient.
On constate que le modèle coopératif occupe une place dans votre stratégie ?
D. d. B. : À mes yeux, le modèle coopératif est essentiel pour préserver l’indépendance des pharmaciens. Ensemble, nous sommes plus forts pour négocier avec les laboratoires et proposer des services innovants. C’est par exemple grâce à cela que nous avons pu lancer récemment « giroSignature » : une offre de services intégrée, clé en main, pour booster la compétitivité des officines.
Un point me tient tout particulièrement à cœur : maintenir un haut niveau d’engagement des pharmaciens dans la coopérative. Au sein de Giropharm, chaque décision est prise collégialement, dans l’intérêt des pharmaciens et de leurs patients. Un fonctionnement qui délivre de la performance économique tout en garantissant notre indépendance face à la financiarisation croissante du secteur.
Cette solidarité crée un cercle vertueux : de meilleures conditions commerciales, des équipes mieux formées, et des patients mieux pris en charge. Un fonctionnement qui n’est possible que grâce à l’engagement de chaque coopérateur. J’affectionne le terme de « coopéracteur » : il traduit mon ambition pour les membres de notre réseau !
Giropharm en chiffres
- 4 milliards d'euros de chiffre d'affaires du réseau
- 1800 pharmacies
- 9,2 % du marché officinal français