Qu’est-ce qui qui vous a amené à écrire ce livre ?
Dominique Schelcher : La crise a véritablement été le déclencheur de l’écriture de ce livre [Le bonheur est dans le près - le commerce au coeur du vivre ensemble, Editions de L'Archipel, mars 2022]. En 2020, notre métier a été vivement salué par le public et nos employés applaudis car étant en « deuxième ligne », après les professionnels de santé. Puis, quelques mois plus tard, sort un sondage indiquant que seuls 37 % des Français ont confiance dans la grande distribution. Je me suis alors immédiatement demandé ce qui pouvait expliquer qu’en si peu de temps nous soyons jugés aussi sévèrement après tout ce que nous avions mis en oeuvre pour tenir la chaîne alimentaire. Ce livre est né sur cette idée-là : faire de la pédagogie sur notre métier. C’est en quelque sorte un plaidoyer pour la grande distribution pour mettre en lumière le commerce tel que nous le vivons au quotidien chez U, avec une forte dimension de proximité et d’ancrage dans les territoires.
Selon vous, les pouvoirs publics ont-ils une responsabilité dans ce changement de regard ?
D. S. : Tout notre travail avait été fortement reconnu par les uns et par les autres donc je ne leur fais aucun reproche. Néanmoins, nous pouvons faire le lien avec les Assises du Commerce qui se sont déroulées fin 2021 et dont l’objectif était de tracer les grandes lignes de l’action commune pour le commerce. Nous avons beaucoup échangé et force est de constater qu’à ce jour, il n’y a eu aucune conclusion. De nombreuses choses sont faites pour l’industrie et pour l’agriculture, à juste titre. Le commerce est lui aussi en pleine transformation et ne doit pas être négligé. Après, nous ne devons pas oublier que dans notre métier, la confiance se gagne magasin par magasin et que les pouvoirs publics ne peuvent rien faire pour cela.
Vous faites le constat d’un consommateur schizophrène. Qu’est-ce qui le caractérise ?
D. S. : Le livre part d’une analyse socioéconomique et dresse un petit état de la France sous l’angle du commerce et du comportement des clients. Ce consommateur est littéralement tiraillé entre cette volonté d’agir, de faire plus pour la planète en consommant des produits à moindre impact, et les contraintes de pouvoir d’achat très fortes qui pèsent sur lui et qui s’accentuent actuellement. On assiste à un choc entre cette envie de changer les choses et des moyens très limités pour pouvoir le faire. Nous connaissons actuellement des crises, sanitaire et économique bien sûr, avec en toile de fond une crise climatique. Il est indispensable que nous trouvions des solutions pour que notre consommation et nos entreprises aient le moins d’impact possible sur l’environnement.
La notion de lien social est au coeur de vos propos. Comment définiriez-vous un commerce de proximité ?
D. S. : Un commerce est de proximité quand il a un visage humain et que les gens en repartent avec un contact, une relation. Nous sommes dans une France complètement fracturée avec des territoires qui se cherchent, qui pour certains ont été abandonnés et où il n’y a plus de commerces ou de services médicaux. Le commerce contribue à faire société et affaiblit un territoire lorsqu’il est absent. En cela, le commerce de proximité a tout son sens et doit être cultivé plus que jamais, afin de ne laisser personne sur le bord de la route.
Le commerce de proximité à tout son sens et doit être cultivé plus que jamais, afin de ne laisser personne sur le bord de la route.
La proximité est au coeur de la stratégie de développement de Système U…
D. S. : Absolument ! Nous avons lancé début 2021 un projet baptisé « Tous en Proximité » dont l’ambition est d’augmenter le parc de magasins U Express et Utile de 800 à 900 magasins, en incitant les patrons de Super U et Hyper U à ouvrir également un magasin de proximité. Nous déployons un vrai plan pour multiplier ces surfaces-là qui rencontrent l’adhésion des clients. Aujourd’hui la force de Système U, c’est d’être un réseau « multiformats » où tous les formats s’épanouissent et ont une rentabilité.
En quoi l’organisation en permet-elle de répondre aux enjeux de demain ?
D.S. : C’est un système extrêmement moderne, à la pointe et parfaitement adapté aux défis de l’époque. Aujourd’hui, être indépendant tout en bénéficiant du savoir-faire collectif et du soutien de ses pairs n’a pas de prix. Quand on croise des entrepreneurs isolés et sans réseau, c’est dramatique surtout par les temps qui courent. La force du réseau est extraordinaire et pour moi, la coopérative est la forme économique la plus aboutie au XXIe siècle.
Si vos lecteurs devaient retenir une idée de votre livre, quelle serait-elle ?
D. S. : C’est vraiment que le bonheur est dans le près ! Plus que jamais, le bonheur est dans l’exercice d’un commerce à visage humain, au plus près des gens ; commerce que l’on essaie d’incarner chez U, et qui résistera dans le temps.
Système U en chiffres en 2021 (et évolution sur un an) :
- 28,6 Md€ CA TTC avec carburant (+ 6,62 %)
- 22,97 Md€ CA TTC hors carburant (+ 2 %)
- Le parc de magasins représente 2 894 105 m² (+ 2,4 %)